INREES

EMI/NDE : une expérience au-delà de l’ordinaire.

« …Après m’être retrouvée au plafond de la salle d’opération…puis dans un abîme de ténèbres…j’ai vu une lumière. A partir de ce moment, je n’étais plus seule au monde. J’ai été propulsée à une vitesse prodigieuse vers cette lumière…dans laquelle je suis rentrée. C’était un océan d’Amour pur, de celui qui s’offre sans rien demander en retour. J’étais…totalement comprise, comblée et aimée telle que j’étais. Je n’avais plus conscience du temps et de l’espace…C’est comme si, tout en étant moi, je devenais tout et que je retrouvais ma nature réelle. Mon Dieu, comment partager cette expérience ? Si chacun pouvait la vivre, ne serait-ce qu’un instant, il n’y aurait plus de misère ni de violence, ni de guerre sur cette planète. Le sens de l’existence serait perçu et la beauté serait son accomplissement… Près de moi, il y avait un être de lumière. Je ne peux pas décrire le rayonnement et la force d’amour qu’il dégageait. J’ai entendu sa voix qui semblait venir du fond de l’univers, puissante et douce à la fois. Il m’a demandé : « Comment as-tu aimé » et « qu’as-tu fait pour les autres ? »…Pendant le déroulement de ce bilan (de vie), j’étais à la fois celle qui revivait chaque situation avec toutes ses émotions, et l’autre partie de moi, celle qui…était toute sagesse, connaissance et justice…Je me rappelle aussi avoir été en possession d’une grande connaissance. En quelques secondes, j’ai vécu des millénaires….Je me rappelle avoir réintégré mon corps en passant par ma tête et m’y être glissée comme dans une chaussette. Toute l’expérience s’effaçait…Finie la plénitude, finie la liberté (et la connaissance totale)….Mais je sais depuis que l’amour est le secret de la vie »

Extrait du livre-témoignage de Nicole Dron « 45 secondes d’éternité » ed. Kymzo, 2009. Récit autobiographique d’une E.M.I vécue en 1968, alors que Nicole a 26 ans. Après la naissance de son deuxième enfant et suite à 2 hémorragies, son cœur s’arrête pendant 45 secondes sur la table d’opération.

Le dernier film de Clint Eastwood, « Au-delà », aborde le thème tabou de la mort, ainsi que les sujets controversés de la vie après la mort, les EHC (expériences hors du corps), la médiumnité, les EMI (expériences de mort imminente). Ces dernières ont fait l’objet d’adaptations cinématographiques telle que : « L’expérience interdite » de Joël Schumacher en 1990.

Le film « Au-delà«  a le mérite d’aborder des sujets sensibles tout en mettant en garde contre le charlatanisme et l’exploitation de la douleur de gens endeuillés ou crédules. Le scénariste Peter Morgan et le réalisateur Clint Eastwood mettent en scène une EMI sans préjugés ni prosélytisme. « Nous ne savons pas de quoi est fait l’au-delà. Certains y croient, d’autres non. C’est seulement après que nous serons fixés » souligne Clint Easwood.

Depuis la nuit des temps…

Si le sujet des E.M.I touche autant, c’est bien sur parce qu’il parle de la mort,  de ce qui lui est associé : Angoisses, douleurs, pertes, deuil… La conscience de la mort  étant propre à l’homme, on trouve des descriptions très anciennes de cette expérience. Le premier récit d’E.M.I connu remonte à 372 avant J.C dans le livre de République. Platon y rapporte via Socrate, l’aventure d’Er le Pamphylien, revenu de l’au-delà pour raconter aux vivants ce qu’il avait vu.

« L’expérience de mort imminente est une expérience profonde que traversent principalement des personnes ayant frôlé la mort. Une EMI implique la sensation de quitter son corps, de transcender nos concepts habituels de temps et d’espace. Certaines personnes rapportent avoir eu des visions de parents et d’êtres chers décédés, quelques fois de figures divines ou mystiques. Parfois on revoit toute sa vie et on juge son propre comportement ; finalement, on atteint un point de non-retour. Ensuite, on en revient et l’on essaie de trouver un sens à cette expérience« , explique la chercheuse Evelyn Elsaesser-Valarino. Le cardiologue néerlandais Pim van Lommel la définit comme un « état de conscience particulier qui se produit pendant une période imminente ou effective de mort physique, psychologique ou émotionnelle » : arrêt cardiaque, coma, anesthésie, choc émotionnel, expérience mystique.

Des récits d’expériences similaires se retrouvent dans les folklores et écrits du monde entier, quelques soient les cultures et les croyances religieuses. La première publication décrivant l’EMI comme un syndrome clinique se fit en 1892 à l’initiative d’Albert Heim, géologue passionné d’alpinisme. Il expérimente l’E.M.I en 1871 lors d’une chute. «…pendant la chute, je vis comment  mes proches reçurent l’annonce de ma mort et je les consolai en pensée. Ensuite, depuis une certaine distance, je vis comme sur une scène de théâtre le déroulement de l’ensemble de ma vie en de nombreuses images… Tout était comme transfiguré par une illumination céleste, tout était beau et sans douleur, sans peur et sans aucune tourmente ». Au cours de ses recherches, Heim constate : « Pour la grande majorité de ces personnes (95%), le même phénomène se produit, indépendamment de leur niveau d’instruction… Cet état peut être décrit comme suit : Aucune douleur, aucune peur, aucune trace de désespoir… plutôt une gravité tranquille… le temps semble fortement dilaté. On agit de manière fulgurante et on pense juste. Dans de nombreux cas se produit une revue soudaine de l’ensemble de son passé… ». Même constat pour E.Bush (1983) et Sutherland (1995) qui ont comparé des EMI d’enfants et d’adultes. « Il semble que ce n’est qu’au niveau de la description et de l’interprétation que le conditionnement culturel peut avoir une influence, tandis que la structure profonde  de l’expérience reste universelle« .

Publications, études et statistiques.

En 1975, le psychiatre Raymond A. Moody rencontre un succès inattendu avec la publication du livre « La vie après la vie« . Le scientifique propose l’expression « NDE : Near death experience » pour désigner cet évènement et « experiencers » pour parler des personnes qui l’ont vécu. En français, nous utilisons le terme « EMI : expérience de mort imminente », et « expérienceur ». Cette terminologie avait déjà été employée par le chercheur français Victor Egger en 1895.

En 1981, les américains Kenneth Ring, Bruce Greyson et John Audette (respectivement professeurs de psychologie, de psychiatrie et de sociologie) créent IANDS USA : International Association for near death studies : International Association for Near Death Experience (Association internationale d’études des états de mort imminente. Chez nous, IANDS France* travaille depuis 1987 au recueil et à l’étude des témoignages d’expérienceurs. L’IMI, Institut de métaphysique* depuis 1919, et maintenant l’INRESS* depuis 2007, étendent leurs recherches à toutes les expériences paranormales et transpersonnelles. Avec le développement des techniques de réanimation, la mise en place de structures de soins palliatifs, des dizaines d’études, fruits d’années de recherches, ont été publiées.

Selon les études (Ring en 1984, Sutherland en 1984…), entre 55 et 89% des expérienceurs développent des capacités extrasensorielles. L’hypothèse avancée est que tout être humain posséderait ces facultés à l’état latent et qu’un élargissement de la conscience activerait ce potentiel.

Dans « Ma vie, souvenirs, rêves et pensées« , le Psychiatre suisse C.G.Jung rapporte une description très similaire aux EMI survenues  après un infarctus en 1944 : « …Bien loin en-dessous de moi, j’apercevais la sphère terrestre baignée d’une merveilleuse lumière bleue… Je savais que j’étais entrain de quitter la terre… tout ce que je croyais, désirais ou pensais … se détachait de moi ».

Fréquence de l’EMI : Selon les études outre-Atlantique, de 5% à 36% des individus pensaient avoir frôlé la mort à un moment de leur existence. En France, le chiffre de 2 millions d’expérienceurs est généralement avancé.

Conséquences et bouleversements

L’étude de milliers de NDE a fait ressortir la présence de composantes bien identifiables qui forment un schéma type de l’expérience. Il n’y a pas deux NDE semblables, et tout le monde ne vit pas toutes les étapes connues, mais une NDE est facilement reconnaissable à certains traits particuliers comme la sensation de sortir de son corps, l’impression de pénétrer dans une réalité transcendante, la perception d’une lumière-présence irradiante d’amour, etc.

Une NDE se produit chez des individus normaux et sains, qui la plupart du temps ignoraient tout de l’expérience avant qu’elle ne survienne. Des personnalités du monde scientifique, médical, politique et artistique ont d’ailleurs vécu des NDE, mais hésitent à en parler publiquement. On la retrouve chez l’enfant comme chez le vieillard, chez l’homme comme chez la femme, indépendamment de leur milieu d’origine (Iands-France).

« Les expérienceurs souffrent du décalage entre leur nostalgie de cet état de sérénité, de liberté, de bonheur et d’amour absolu qu’ils ont vécu lors de l’EMI et la difficulté à se réinsérer dans le cadre familial et communautaire dont ils ne reconnaissent plus tout à fait les valeurs ni les aspirations. Commence alors un  long cheminement vers une nouvelle façon de vivre qui pourra se mettre en place quand l’EMI sera complètement intégrée « E.E Valarino.

Le processus est d’autant plus long que l’expérienceur vit dans un milieu ou une culture imperméable à ce genre d’expérience. Au mieux, il est pris pour un rêveur ou un doux illuminé ; au pire pour un fou furieux à interner sans tarder.

Pim van Lommel résume les conséquences d’une EMI (étude sortie en 2001 dans le journal médical britannique « The Lancet » sur 344 rescapés d’arrêt cardiaque en hôpitaux).

« Une EMI est à la fois une crise existentielle et une intense leçon de vie. Les individus changent après une EMI car ils ont vécu l’expérience consciente d’une dimension dans laquelle le temps et la distance sont abolis…ils expérimentent la connaissance illimitée et l’amour inconditionnel… Après une EMI, les individus se rendent compte que tout et tous sont connectés, que chaque pensée a un effet à la fois sur soi-même et les autres et que notre conscience perdure au-delà de la mort physique. Ils réalisent que la mort n’est pas la fin de toute chose. »

Pour la plupart, la relation d’empathie envers les autres prime sur l’attachement aux biens matériels et à la réussite sociale. La soif de connaissance, la spiritualité, la diminution de la peur de la mort et la croyance en une vie après la mort sont caractéristiques.

Les enfants et les adolescents traversent également une transformation profonde et durable. Leur statut familial, le lien de loyauté et d’obéissance à leurs parents leur laissent moins de liberté pour réaménager leur vie. Ils se sentent seuls, différents, et s’isolent souvent des autres. Comme pour certains adultes, il existe un risque de dépression ou autre signe de mal-être à ne pas prendre à la légère.

Certaines personnes témoignent d’une EMI « négative ou effrayante« . Avec le recul, lorsque cette expérience est bien intégrée, elles concluent sur la chance d’avoir pu faire cette remise en question de leurs valeurs. Elles réalisent que le choc de l’ego et/ou la défense contre ce décalage avec leur vie précédente a pris le dessus. Le « tsunami » émotionnel a alors été trop débordant pour laisser la place aux conséquences positives. D’aucunes choisissent aussi la thèse du « cocktail neurochimique » inondant le cerveau au moment de la mort… cette thèse est âprement discutée par les chercheurs de tous bords.

Les EMI d’aveugles : Une étude menée par Ring et Cooper en 1999 sur des aveugles, y compris de naissance, témoigne de perceptions visuelles et du déroulement identique de l’expérience.

Quant à une EMI consécutive à une tentative de suicide, elle a pour bénéfice pour 99 % des sujets de n’être pas suivie de récidive ; ce qui n’est malheureusement pas le cas pour les TS classiques.

Phases types du déroulement d’une EMI

  • La sortie hors corps
  • Le passage par un tunnel
  • L’apparition d’une lumière éclatante
  • La rencontre avec un être de lumière personnifiant l’amour inconditionnel
  • Le sentiment de bonheur infini et d’une paix profonde
  • La rencontre avec des proches décédés ou des guides
  • La vision de paysages paradisiaques
  • La revue de vie panoramique
  • L’accès à la connaissance absolue
  • La vision du futur individuel ou collectif
  • La certitude d’appartenir à une unité cosmique et d’en comprendre les lois et le sens
  • Perception d’un point de non-retour
  • Retour à la vie choisi ou imposé

Différentes hypothèses d’interprétation

Nous avons déjà abordé la notion de défense psychologique

Sur le plan psychiatrique,  les troubles dissociatifs diffèrent de l’EMI en ce sens que la personne se sent décalée et non séparée de son corps comme dans l’EMI. De plus, elle ne reproduit pas la richesse de contenu ni les phases classiques de l’expérience extraordinaire.

Même chose pour les hallucinations et l’anoxie (privation d’oxygène dans le cerveau). On constate qu’un traitement psychiatrique calme les hallucinations d’une personne malade. Le même traitement sur une personne « normale » ayant vécu une EMI n’élimine pas le souvenir du vécu transpersonnel. La plupart des délires et des hallucinations rendent les gens plus angoissés et agressifs. Au contraire, les EMI favorisent l’altruisme, l’optimisme, le respect et l’amour de la vie. Bien sur, une personne atteinte de troubles psychiatriques peut également vivre une EMI.

Les scientifiques avancent l’hypothèse d’un cocktail chimique inondant le cerveau au moment de la mort et procurant un état euphorique.

Etat de la recherche

A ce jour, aucun modèle médical, neurologique, psychologique et parapsychologique n’est en mesure d’expliquer l’EMI dans sa globalité et toutes ses composantes. « C’est reconnaitre les faits que de dire que quelque chose sort du corps, perçoit véritablement, pense et ressent des émotions, indépendamment du corps ; mais nous ne savons pas de quoi il s’agit. Nous avons des termes religieux pour définir cette expérience, mais pas de vocabulaire scientifique » B. Greyson 2008.

Les recherches continuent. A l’étranger et en France, sous l’instigation principalement de IAND-France*, L’IMI* et L’INRESS*.

Des modèles neurophysiologiques commencent à émerger et il est probable que ce sont des expériences de ce type qui sont à l’origine du sentiment du sacré et de la constitution des religions.
Pouvant difficilement être mesurée à l’aide des critères de la réalité matérielle habituelle, la NDE met en jeu de nombreuses redéfinitions : réalité, normalité, croyance, spiritualité, etc. (IAND-France).

La position du thérapeute de santé

Ecoute rigoureuse, bienveillante, sans jugement ni interprétation réductrice sont des pré-requis indispensables. Un diagnostic différentiel approprié doit être posé. Attention aux gourous et autres charlatans sans aucune formation clinique rigoureuse et/ou profitant de l’expérienceur pour l’abuser.

Cette expérience bouleverse la vie, modifie l’échelle des valeurs. Elle oblige à réaménager ses priorités, ses choix de vie et à réorganiser ses relations avec l’entourage. Cela crée souvent des tensions, des incompréhensions vis-à-vis de cette personne que l’on ne reconnait plus.

L’EMI est un rite de passage, une initiation dont la richesse des apports n’est pas simple à intégrer. La « conversion » est parfois radicale : métier, couple, amis, spiritualité… quelle nouvelle voie d’accomplissement choisir pour « remplir sa mission », celle qui a justifié le « retour ».

Autant de thèmes abordés lors d’une psychothérapie dont le but reste d’accompagner une personne dans la découverte de ses origines, du sens donné  à son existence en relation avec le monde et à l’accomplissement du Soi en soi.

*IANDS-France www.iands-france.org/

*IMI www.metapsychique.org/

*L’INREES, Institut de Recherche sur les Expériences Extraordinaires, offre aux soignants, à la communauté scientifique, ainsi qu’au grand public la possibilité de mieux comprendre ces expériences hors du commun vécues par des millions de personnes
www.inress.com/

Des livres pour aller plus loin :

« Deadline, dernière limite » du Dr Jean-Pierre Jourdan. Ed. Pocket 2010.

« Les Preuves scientifiques d’une vie après la vie » Dr Jean-Jacques Charbonnier.

Ed. Exergue. 2008.

« L’arbre du choix » de Nicole Canivenq. Ed. Le Temps Présent. 2010

« 45 secondes d’éternité » de Nicole Dron. Ed. Kymzo. 2009.

« La mort n’est pas une terre étrangère » de Stéphane Allix. Ed. Albin Michel. 2011.

« Manuel  clinique des expériences extraordinaires ». Sous la direction de Stéphane Allix et Paul Bernstein. Ed. INREES/ Inter Editions. 2009.

Un dossier complet consacré à l’EMI ou NDE est disponible sur le Magazine de l’Inrees de janvier 2011, suite à la sortie du film « Au-delà » de Clint Eastwood. Disponible à partir du site de l’Inrees  www.inress.com/

Patricia SERIN

Novembre 2019

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *