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« Le Prophète », chapitre 26

Puis Almitra parla, disant : Nous voudrions vous interroger au sujet de la Mort.

Et il répondit :

Vous voudriez connaître les secrets de la mort.

Mais comment le trouverez-vous sinon en cherchant au cœur même de la vie ?

Le hibou dont les yeux perçant la nuit sont aveugles le jour, ne peut révéler le mystère de la lumière.

Et si vous voulez vraiment apercevoir l’esprit de la mort, ouvrez grand votre cœur dans le corps de la vie.

Car la vie et la mort sont une, de même que le fleuve et l’océan sont un.

Dans les profondeurs de vos espoirs et de vos désirs, réside votre silencieuse connaissance de l’au-delà ;

Et comme des graines rêvant sous la neige, votre cœur rêve du printemps.

Ayez confiance dans les rêves, car en eux est cachée la porte de l’éternité.

Votre peur de la mort n’est autre que le frémissement du berger, alors qu’il se tient devant le roi dont la main va se poser sur lui pour l’honorer.

Le berger n’est-il pas ravi, malgré son tremblement, de porter la marque du roi ?

Pourtant, n’est-il pas plus conscient encore de son tremblement ?

Car qu’est-ce que mourir, si ce n’est être debout, nu, face au vent et fondre dans le soleil ? Et qu’est-ce que cesser de respirer sinon libérer le souffle de ses marées tempétueuses, afin qu’il s’élève et se dilate et recherche Dieu sans entraves ?

C’est seulement quand vous aurez bu à la rivière du silence que vous chanterez vraiment.

Et quand vous aurez atteint le sommet de la montagne, vous commencerez votre ascension.

Et quand la terre réclamera vos membres, alors vous danserez vraiment.

Ex trait du livre « Le Prophète » écrit en 1923 par le poète Khalil Gibran (1883 – 1931)

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